Le dépistage d’une allergie alimentaire nécessite une démarche diagnostique précise et cohérente. Différents moyens sont utilisés :

L’interrogatoire

Quelquefois, une histoire clinique convaincante est suffisante pour poser le diagnostic d’une allergie alimentaire. Sampson l’a définie comme une réaction anaphylactique apparaissant moins d’une heure après l’ingestion de l’aliment isolé, connue depuis moins de 3 ans, et ayant nécessité un traitement médical d’urgence. Dans tous les autres cas, il est nécessaire de réaliser d’autres investigations.

Le médecin devra alors s’intéresser aux antécédents familiaux atopiques (80% des cas) et aux antécédents personnels atopiques (= facteur de risque pour le développement d’une allergie à un nouvel aliment).

Le médecin devra aussi effectuer un examen clinique (de la peau, des voies respiratoires…) et interroger le patient sur le délai d’apparition des symptômes, le nombres de réactions déjà observées, les modifications (voire aggravations ou améliorations) éventuelles des signes lors des ré-expositions… L’interrogatoire va essayer de déterminer le ou les aliment(s) susceptibles d’induire des réactions (+ quantité d’aliment(s) provoquant des signes).

Les médecins s’aident quelquefois d’un questionnaire standardisé afin de faciliter l’interrogatoire et d’éviter les oublis :

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Les tests cutanés

 

Les prick tests

Comme l’expliquent Rancé et Bidat, « Les tests cutanés sont réalisés par prick test, technique simple, rapide et très spécifique. Une goutte d’allergène est déposée sur la peau, puis une piqûre est réalisée à travers la goutte de réactif. Ils sont réalisés au niveau du bras ou du dos et sont espacés de 3 cm. Différentes aiguilles pour prick tests sont disponibles et le choix dépend de l’expérience de chaque utilisateur. La lecture du test est effectuée à 15 minutes. La plupart des fruits et légumes perdent rapidement leur activité allergénique et leurs allergènes ne sont pas représentés de façon suffisante dans les extraits commerciaux. Pour cette classe d’aliments, on utilise de plus en plus fréquemment des produits frais ou dits natifs ; le prick test est alors réalisé en piquant le prick dans l’aliment puis en effectuant la piqûre sur le dos (prick + prick). La valeur prédictive négative est excellente avec les extraits natifs, de sorte que des tests cutanés négatifs pourraient exclure une allergie alimentaire. En revanche, un test cutané positif témoigne d’une simple sensibilisation justifiant de poursuivre les explorations pour préciser s’il s’agit d’une authentique allergie alimentaire. Les extraits frais donnent une réponse plus forte que les extraits commerciaux, ils sont aussi plus sensibles. »

Les tests cutanés ont une excellente sensibilité (›95%) mais une faible spécificité de 50% (si l’on ne tient pas compte de l’histoire).

Avant de faire les tests cutanés, on doit arrêter la prise d’anti-histaminiques pendant plusieurs jours (en fonction du type de médicament pris). On réalise aussi 2 prick tests afin d’interpréter le test : il s’agit d’un témoin positif pour vérifier que la peau réagit normalement (tout le monde réagit) et d’un témoin négatif pour s’assurer que la peau ne présente pas de réaction avec les extraits dilués.

Les patch-tests ou tests épicutanés

Ils permettent de diagnostiquer l’hypersensibilité retardée et sont utiles dans les eczémas de contact.

Il s’agit de timbres adhésifs sur lesquels sont fixées des cupules contenant les allergènes. Ces patchs sont placés dans le dos dans une zone exempte d’eczéma et la lecture est réalisée à 48 et 72h, 20 minutes après le retrait des patchs.

D’après Strömberg, les patch-tests seraient plus sensibles que les prick tests pour diagnostiquer l’allergie alimentaire chez les enfants souffrant d’eczéma / dermatite atopique, spécialement chez les moins de 2 ans.

Mehl et al. estiment que, bien que la capacité prédictive des patch-tests soit améliorée quand ils sont combinés avec des mesures d’IgE spécifiques ou des prick tests, les tests de provocation orale deviennent superflus chez seulement 0,5 à 14% des patients étudiés.

D’après Canani, les patch-tests seraient utiles pour diagnostiquer les enfants souffrant de symptômes gastro-intestinaux liés à une allergie alimentaire. La précision diagnostique des patch-tests serait plus élevée avec des aliments frais qu’avec des extraits commerciaux.

Les tests in vitro – prise de sang

Les tests in vitro (RAST et ELISA par exemple) sont également effectués pour rechercher une éventuelle allergie alimentaire médiée par les IgE mais ils sont considérés comme moins sensibles et moins spécifiques que les tests cutanés.

Le dosage des IgE totales

Ce dosage ne sert pas à grand-chose dans le dépistage d’un terrain allergique car des IgE totales élevées peuvent être le signe d’infections virales ou de parasitoses par exemple.

Le dosage des IgE spécifiques

Comme pour les tests cutanés, des IgE spécifiques à un allergène positives montrent qu’il existe une sensibilisation. Sans réaction allergique, on parle de sensibilisation. Lors de manifestations cliniques au contact de l’allergène, on parle d’allergie.

Les tests de provocation

 

Le test de provocation labiale

Au cours de ce test, on met les lèvres en contact avec des aliments afin de vérifier s’il y a manifestation allergique ou non. Ce test est simple, rapide et peu coûteux.

Le test de provocation orale

Lorsque l’on n’arrive pas à déterminer s’il y a sensibilisation (les tests cutanés et/ou sanguins sont positifs) ou allergie, on pratique un test de provocation orale avec des quantités croissantes d’aliment(s). Ce test permet de cibler le ou les allergène(s) responsable(s) des réactions et d’éviter des évictions alimentaires inutiles. Le fait de donner des quantités de plus en plus importantes d’allergène permet de déterminer la quantité d’aliment qui déclenche les réactions (= dose cumulée réactogène) ainsi que le type de symptômes. Cela permet d’évaluer le risque encouru par la consommation accidentelle de l’aliment et ainsi de prendre les mesures thérapeutiques nécessaires.

Le test de provocation orale nécessite également l’arrêt des médicaments (corticoïdes et anti-histaminiques) pendant plusieurs jours.

Il existe différents types de tests de provocation orale : en ouvert (la patient et le médecin sont au courant du contenu du test), en simple aveugle (seul le médecin connaît le contenu du test) et en double aveugle (aucun des deux ne connaît le contenu du test).

Le test en ouvert est très utile pour éliminer les causes. Ce test est suffisant chez la plupart des patients chez qui l’on suspecte une allergie pour confirmer un diagnostic.

Le test en simple aveugle est utile pour confirmer des symptômes objectifs.

Le test en double aveugle est réalisé dans des circonstances particulières : un contexte psychologique difficile, une croyance familiale ancrée pour de multiples aliments, un syndrome d’allergies multiples, les symptômes subjectifs du grand enfant (douleurs abdominales, myalgies), la prise accidentelle d’un aliment suspect sans réaction clinique et persistance de la croyance familiale dans l’allergie alimentaire et des études scientifiques en allergologie alimentaire (Rancé et Bidat).

Les tests de provocation en double aveugle contrôlés par placebo (DBPCFC – double-blind placebo-controlled food challenge) sont les « étalons or » pour le diagnostic des allergies alimentaires et pour valider les études en allergologie alimentaire. cependant, ils prennent du temps, sont onéreux et peuvent être pénibles pour le patient (risques de réactions systémiques sévères).

Ils doivent être réalisés par un personnel entraîné et dans un lieu où un équipement permettant de prendre en charge les réactions d’anaphylaxie est disponible immédiatement (c’est-à-dire en milieu hospitalier).

Ces tests sont contre-indiqués chez les patients avec une histoire évidente d’anaphylaxie suite à l’ingestion isolée d’un aliment. Cependant, si plusieurs aliments ont été consommés par le patient et que plusieurs tests cutanés sont positifs, il est primordial d’identifier l’aliment responsable !

L’Académie Européenne d’Allergologie et d’Immunologie Clinique (EAACI) s’est positionnée concernant la standardisation des tests de provocation chez les patients souffrant de réactions immédiates.

Conclusion

On peut résumer en reprenant un texte de Juchet : « Dans l’allergie alimentaire IgE-dépendante, la positivité des prick tests et des IgE spécifiques permet uniquement de poser le diagnostic de sensibilisation alimentaire. Le diagnostic d’allergie alimentaire est confirmé par la positivité du test de provocation orale. Dans les formes mixtes et non IgE-médiées d’allergie alimentaire, les prick tests doivent être complétés par des atopy patch tests aux aliments consommés couramment par l’enfant. En cas de positivité, la pertinence des tests est affirmée par l’amélioration des symptômes sous régime d’éviction. La récidive des symptômes lors d’un test de provocation orale confirmera le diagnostic d’allergie alimentaire. »

   
© ciriha

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